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Au has'Art de la Thérapie

8 mars 2011

Franz Xaver Messerschmidt & ses têtes en métal

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Franz Xaver Messerschmidt (1736-1783) est né en Bavière, mais d'abord célèbre à Vienne, ce sculpteur singulier et troublant est essentiellement connu pour une série de têtes en métal, hyperréalistes dans leur facture et totalement expressionnistes par leurs tensions et leurs rictus. Ses fameuses "têtes de caractère" réalisées hors commande, fascinèrent autant les psychanalystes que les artistes comme Gustav Klimt ou Egon Schiele, ou les historiens de l'art.

 

Professeur adjoint à l'AcadémieRoyale des Beaux-Arts de Vienne en 1769 et portraitiste des cercles aristocratiques et intellectuels vivant dans la capitale autrichienne: il réalise des bustes du couple impérial et de personnalités des Lumières viennoises, dont le médecin magnétiseur Franz-Anton Mesmer. En 1774, il se voit refuser le titre de professeur en titre à l'unanimité de ses collègues, en raison de son caractère difficile. Ulcéré, il quitte Vienne après avoir liquidé ses biens, passe par Munich et s'établit en 1777 à Presbourg - Bratislava aujourd'hui -, où il meurt six ans plus tard.

 

Il semble qu'il commença à sculpter ses têtes en 1771, on ignore combien de têtes Messerschmidt a réalisées pendant sa vie. De l'ordre dans lequel les têtes ont été modelées, on ne sait rien. Les titres qu'elles portent aujourd'hui leur ont été donnés pour la présentation de 1793 : titres posthumes et sans valeur. On ne sait pas plus si Messerschmidt les regroupait en catégories. Dix ans après sa mort, en 1793, son frère en vendit 49 à un particulier. Celui-ci les transféra à Vienne où elles furent exposées pour la première fois au public.

 

Constituées principalement d'un alliage d'étain et de plomb, parfois en albâtre, jamais vendues malgré des offres généreuses, elles ont accompagné le sculpteur tout au long d'une carrière de plus en plus incertaine en raison des troubles psychiques qui l'affectent très tôt et entraînent son expulsion de l'Académie en 1774. Confronté à ses délires, Messerschmidt va sans doute trouver dans ses visages déformés une manière d'exorciser les esprits maléfiques qui le persécutent et lui causent des souffrances psychiques et physiques.

 

Ces têtes, exclusivement masculines et correspondant à différents âges, sont strictement frontales et surmontent l’amorce d’un simple buste. La représentation de l’expérience émotionnelle, la fidélité avec laquelle l’artiste rend l’expression du visage (yeux grands ouverts ou fermés par des paupières serrées, bouches grimaçantes, traits crispés) sont impressionnantes de maîtrise. Derrière leur aspect théâtral, ce ne sont ni des masques ni des caricatures. Bien que muets, parfois même la bouche bâillonnée, les visages hurlent les tensions de l'âme, la souffrance psychique et corporelle.

 

Si l’on trouve des équivalences à sa sculpture principalement dans les domaines du dessin, avec en premier lieu les précurseurs Léonard de Vinci (dont les caricatures sont publiées en 1730) ainsi que Charles Lebrun, ou encore dans la peinture rococo (Ducreux, Liotard…), ce type de représentations de l’instantané (rire, grimace, bâillement…) est rare en sculpture. Mais en l’espèce, l’art de Messerschmidt va plus loin qu’une mise en forme d’instantanés, de mouvements naturels : ses expressions sont outrées, paroxystiques.

 

Selon l'écrivain allemand Friedrich Nicolai, qui lui rendit visite deux ans avant sa mort en 1783 à 47 ans à Presbourg (aujourd'hui Bratislava), l'artiste se pinçait en se regardant dans un miroir en faisant diverses grimaces. Ainsi entendait-il capter les esprits qui le tourmentaient. Il reproduisait avec une grande précision les déformations de son visage dans la pierre, le bois ou le plâtre. Et, une fois figée, la douleur se trouvait comme piégée à l'extérieur. Neutralisée, en quelque sorte.

 

Aux confluences de la physiognomonie et de l'art, les sculptures de Messerschmidt interrogent le spectateur sur les notions de Beau et de normalité. Aujourd'hui encore, les sculptures de Franz-Xaver Messerschmidt continuent à poser leurs énigmes sans réponses.



 
 

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7 mars 2011

Cécile Bocéno & Monologue...chimiothérapie

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Une "oeuvre de 365 jours" qui témoigne de l’expérience de la maladie avec un regard sur le monde.

 

"Monologue" : la lutte au quotidien

Cécile Bocéno, plasticienne et enseignante, présente une série de 365 toiles retraçant jour après jour, l'année de sa lutte contre le cancer.

Au premier jour, elle se dit que « l'empreinte, c'est le pied ». Au 129e, elle n'a même pas peur. Au 194e, elle retrouve le sommeil. Image après image, Cécile Bocéno, plasticienne et enseignante, a égrainé une année de sa vie. Mais pas n'importe laquelle…

Le 3 juillet 2009, à 39 ans, elle apprend qu'elle est atteinte d'un cancer du sein. Entre le jour de cette annonce brutale et sa première chimiothérapie, le 22 juillet, elle crée sa première composition, début d'un travail de 365 jours durant lequel elle va raconter son parcours de soins à l'Institut Claudius Regaud, les étapes de son traitement, les états de son âme.

Chaque image est un collage où titres de journaux, photos, dessins, estampes viennent se poser sur une feuille d'or et un fond de papier pour délivrer le message ou l'émotion du jour, à la manière d'un journal intime. Certaines sont accompagnées d'une légende, toutes portent l'empreinte de l'arête d'une main, véritable fil rouge et signature de l'artiste.

« Dans ce travail, j'ai voulu raconter mon expérience, garder une trace de l'épreuve que je traversais en la transformant en quelque chose de positif et apporter un témoignage. C'est devenu l'une des raisons de m'accrocher.

Quand on sent que la vie s'en va, le processus créatif s'intensifie et l'art devient le prolongement de notre corps, de notre esprit. Toutes les images, fruits de 24 heures de réflexion, relèvent du même procédé. J'ai utilisé différentes références, littéraires, historiques, philosophiques ou biographiques que je découpais dans la presse, guidée par mes émotions, pour parler de l'actualité ou de ce que je ressentais.

Elles retracent, sans aucun mensonge ni aucune concession, les étapes à franchir, disent la révolte, le refus, la peur devant la maladie et enfin l'acceptation ». Au 50e jour du traitement. « C'est à ce moment-là seulement que l'on peut commencer à lutter ».

« J'ai dû m'extraire du monde pour pouvoir lutter »

Tenant dans une boîte à chaussure pour être facilement accessible les jours de grande fatigue et transportable partout, y compris à l'hôpital, son « atelier » ne l'a jamais quittée. Véritable compagnon de route, c'est lui qui a fourni à Cécile Bocéno la matière quotidienne de son « monologue ».

« J'ai dû m'extraire du monde pour pouvoir lutter. Mon seul lien avec lui passait par la presse écrite et ce sont les images, qui chaque jour, me permettaient de renouer le contact. Quant à l'empreinte, la tranche de ma main sur le papier, c'est un peu ma marque de fabrique depuis 1997. Dans ce travail, c'est moi dans le monde, une façon de me rappeler que je suis toujours là ».

A la veille du vernissage de son exposition, intitulée « Monologue », au Pavillon A du musée des Abattoirs, Cécile Bocéno regarde son œuvre enfin installée mais avec l'œil de l'artiste. « Ce travail a participé à ma guérison mais c'est un travail de plasticien, pas de malade. La maladie n'a été qu'un déclencheur ».

Et c'est bien ce qui ressort de cette série d'images aux interprétations multiples. Décryptées par l'artiste, professeur d'arts plastiques à Pamiers, elles parlent bien sûr du cancer et de ses douleurs mais aussi de son enfance « fabuleuse » passée au Sénégal, de sa formation qui l'a conduite jusqu'au Capes, peut-être même de la Bretagne où elle vivait avant de venir s'installer en Ariège…

Mais hors du contexte de la maladie, l'ensemble, d'une grande cohérence graphique, fonctionne aussi. La polysémie des compositions et des légendes peut inspirer chacun, selon ses propres références. C'est toute la force et l'étrangeté de l'art intime de Cécile Bocéno, qui « transforme le pathos et l'histoire personnelle pour les amener dans le domaine de l'art ».

 

Comment est né ce projet ?

Cécile Bocéno : Je n'ai pas vraiment « mûri » cette exposition. Elle s'est imposée progressivement. Au début de mon traitement, j'ai entrepris une thérapie. Mon spécialiste m'a rapidement conseillé de m'accrocher à mon activité artistique. Je me suis mise alors à réaliser une image par jour sans vraiment réfléchir à cette démarche. Après trois mois, j'ai réalisé que je pouvais transformer la maladie en moteur de la création. C'est devenu un rituel quotidien. Plus tard m'est venue l'envie de témoigner et de partager avec les autres.

 

Parlez-nous de cette oeuvre…

C.B : Je travaille sur le thème de l'empreinte depuis plusieurs années. Je suis naturellement partie de celle de ma main, présente sur chaque création. L'ensemble comprend 365 images réalisées en un an, à la manière d'un journal intime, et retrace les étapes à franchir : peur, refus, épreuve du traitement, puis prise de conscience qu'on peut prendre le dessus, qu'il n'y a pas de fatalité. L'empreinte marque le temps qui passe. Le temps des traitements anticancéreux qui durent longtemps. Mais aussi le temps qui passe car la Terre ne s'arrête pas de tourner pour autant. Ces images sont en outre des réflexions ouvrant sur un monde que je voudrais meilleur.

 

Pourquoi aider l'ICR en lui reversant une partie de la vente des tableaux ?

C.B : Cela me semblait naturel de donner en retour. Le personnel de l'ICR m'a beaucoup soutenue. J'ai voulu lui rendre hommage car il fait partie de cette « histoire ». C'est pourquoi je tenais à exposer au musée des Abattoirs qui se trouve à côté de l'Institut.
Pour les patients et le personnel…


1 mars 2011

Marine Bureau-Kohn & Nib'Art

 Capture_nibartCette exposition est la réalisation d’un travail artistique subjectif sur le vécu de mon cancer du sein.
Je raconte sous la forme de photos, sculptures, peintures, film et installation, mes jours, de la découverte de ce "crabe" jusqu'à la fin de mes soins.
Mon expérience est devenue un objet artistique:"Nib'Art"que je souhaite partager avec vous, malade ou pas.
Maintenant, je sais que l'art fait partie du protocole de mes soins, "l'art ne nourrit pas toujours son homme, mais il peut l'aider à guérir.

nibart@wanadoo.fr


Cancer du sein : "l'art, mon lien avec la vie" ; "l'art, ma béquille face à la maladie"

Artiste plasticienne, Marine Bureau-Kohn voit sa vie basculer à 47 ans, quand on lui annonce qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. Pourtant, loin de baisser les bras, elle décide de se battre sans relâche contre "son crabe". Son art, pour lequel elle a dédié sa vie, son humour, mais aussi son entourage la porte vers la guérison, quelques mois plus tard. Retour sur un parcours porteur d'espoir. A l’annonce de son cancer du sein, cet art s’est donc naturellement imposé comme un moyen d’exprimer ses angoisses. L’artiste revient sur ses premières confrontations entre elle et le "crabe", point de départ de l’exposition qu’elle a intitulée Nib’Art…

 

Comment avez-vous appris que vous étiez atteinte du cancer du sein ?

Marine Bureau-Kohn : J’ai appris l’existence de mon cancer comme toutes les femmes. En passant une mammographie, on s’est aperçu qu’il y avait une opacité. Mon médecin a voulu refaire un cliché. Je me souviens de lui avoir demandé « Qu’est-ce que c’est ? C’est le "crabe" ? ». Elle m’a répondu que j’avais 50 % de chance que ce soit un cancer. Ce qui était le cas : il fallait extraire la tumeur.

Quelle a été votre réaction ? L’art s’est-il immédiatement imposé comme moyen d’expression ?

M. B-K : En tant qu’artiste plasticienne, la création fait partie de mon quotidien. Je créais avant d’être malade, j’ai continué pendant que j’étais malade et je continue aujourd’hui. Choisir des objets, les mettre en scène, cela fait partie intégrante de mon histoire. A l’annonce de ma maladie, je n’ai donc rien décidé du tout. Je suis rentrée chez moi, j’ai eu besoin de parler. J’ai pris un magnétophone pour communiquer avec mes parents. Je voulais leur annoncer mon cancer en évitant de trop les perturber, et aussi, de porter leur angoisse. J’ai pris une cassette et j’ai vidé mon sac. Au départ, je pensais que c’était pour eux. Je me suis finalement rendu compte que j’étais en train de vomir mes propres angoisses, mes douleurs, mes craintes. Ce fut le point de départ de mon exposition.

Le cancer a-t-il changé votre démarche artistique ?

M. B-K : On ne devient pas artiste plasticienne parce qu’on a un cancer ! Mais il est vrai que la création est un moyen d’évacuer un sentiment fort, qu’il s’agisse d’une hystérie d’amour ou de la crainte de la maladie. J’ai toujours eu naturellement et instinctivement ce besoin de créer. Il a bien sûr continué à se manifester pendant ma maladie.

Votre art a-t-il évolué au cours de votre maladie ? Avez-vous ressenti le besoin de créer autrement, au rythme des coups durs et des regains d’espoir ?

M. B-K : J’ai commencé ce qui allait devenir l’exposition Nib’Art avec cette cassette pour mes parents, que j’ai enregistrée dès l’annonce de mon cancer, une demi-heure après la mammographie. J’ai terminé le jour de ma dernière séance de rayons. Le soufflet était retombé, j’étais venue à bout de mon cancer, ma démarche artistique autour de la maladie aussi. Une amie est venue peindre sur ma tête – avec la chimiothérapie, je n’avais plus de cheveux – et après, tout est parti dans des caisses. C’était terminé.

Comment avez-vous vécu le traitement ?

M. B-K : On vit toujours dans la pression du traitement, un rythme infernal qu’on vous impose et qu’on ne peut pas fuir. Une fois que l’on est dedans, c’est un véritable engrenage : l’ambulance vient te chercher, tu fais une séance de rayons. Dès que tu te sens mieux, on te remet une dose, et ainsi de suite. Il y a beaucoup de hauts et de bas. Puis, un jour, l’ambulance te dépose chez toi après ta dernière séance de rayons, tout est réglé, plus personne ne s’occupe de toi… C’est très étrange !

Comment êtes-vous parvenue à créer avec ce rythme si difficile ?

M. B-K : Mon mari a été très présent pendant les neuf mois qu’a duré le traitement, il ne m’a jamais quittée. Il a été d’un soutien sans faille, il m’a aidée à canaliser mes idées, à les mettre en place. C’est notamment lui qui allait à l’usine pour me tailler les objets, une table en bois par exemple, qui réalisait pour moi les travaux manuels. Je lui demandais ce que je voulais, il le faisait, me le rapportait, et après seulement, je pouvais bricoler. Je n’avais pas l’énergie de faire ça toute seule.

Votre mari a eu un rôle primordial dans votre processus créatif. Et le reste de votre entourage ?

M. B-K : Mon travail créatif a été une thérapie pour moi et pour mon mari, mais j’ai aussi impliqué beaucoup de mes amis. Ils étaient là pour les bons moments, j’ai estimé qu’ils devaient aussi être là pour m’aider à vivre ce cauchemar. Ils se sont investis dans mon travail. Quand je leur ai envoyé un petit mot pour les inviter à venir peindre sur mon crâne, ils se sont succédé à la maison pendant six mois. D’un seul coup, ils prenaient du temps pour moi, ils venaient aussi découvrir une nouvelle matière pour peindre, ils ont d’ailleurs beaucoup aimé s’exprimer sur ma peau… En même temps, cela voulait dire que je ne les dégoûtais pas, que mon cancer ne les repoussait pas. Ces séances picturales ont duré entre trois minutes et trois heures. Elles ont été des moments très forts de communion, d’amour et de connivence. C’était très important pour moi…

Votre entourage vous a-t-il aussi aider à conserver votre identité mais aussi votre féminité face à la maladie ?

M. B-K : J’ai vécu une période très difficile lors de la perte de mes cheveux. Un moment qui a représenté pour moi l’abandon de mon corps. J’ai donc créé un cérémonial pour contourner cette épreuve. Une amie est venue tondre ce qui me restait de cheveux et me maquiller, son mari m’a filmé, le mien prenait les photos. On a ouvert le champagne, c’était l’occasion de se retrouver. Il était important pour moi de ne pas vivre cette étape toute seule devant le miroir. Après ça, j’ai découvert mon crâne, je l’ai aimé, je l’ai adopté, j’en ai joué. A travers ce cérémonial, mes proches m’ont aidé à m’accepter.

Qu’avez-vous appris sur vous-même et sur les autres au cours de votre maladie ?

M. B-K : J’ai d’abord appris que je n’aimais pas souffrir. C’est une horreur. J’ai aussi appris qu’il y a des équipes médicales absolument exceptionnelles, mais aussi que certaines ne sont pas à la hauteur. Grâce à mon site Internet, j’ai aujourd’hui énormément d’échanges avec des femmes qui ont vécu ou vivent la même chose que moi et qui, au-delà de la maladie, ne reçoivent aucun soutien moral. J’ai reçu le témoignage extrêmement triste d’une femme qui m’a dit avoir appris qu’elle était atteinte d’un cancer du sein au détour d’une conversation dans une salle d’attente de l’hôpital. L’annonce du cancer est une étape extrêmement difficile dans la vie d’une femme. Il faut que les médecins apprennent à aborder cette question avec philosophie. Pour ma part, j’ai eu la chance d’être entourée d’une équipe très délicate, qui m’a portée durant toute cette période. J’ai aussi appris qu’il y a des gens très durs, très méchants, qui n’acceptent pas la maladie. Le regard de la maladie les fait fuir, vomir…

Quel message avez-vous voulu transmettre à travers l’exposition Nib’Art ?

M. B-K : Aujourd’hui, je suis passée complètement à autre chose. Pour moi, la maladie, c’est terminé. J’espère que je n’y retournerai jamais. Mais si, en visitant cette exposition, les gens repartent avec un autre regard sur le malade et la maladie, c’est déjà une victoire. J’aurais au moins l’impression de ne pas avoir souffert pour rien. D’après les témoignages que j’ai sur mes livres d’or, il me semble avoir réussi. Mais, attention, je ne suis pas médecin, je ne guéris rien en montrant ce travail, chacun peut en faire la lecture qu’il désire.

Auriez-vous un conseil à donner aux femmes qui sont atteintes d’un cancer du sein ?

M. B-K : Je ne pense pas avoir le droit de donner des conseils. Chacun a sa vie, son passé, son histoire. Chacun a donc sa façon de réagir face à l’annonce du cancer. Certaines s’effondrent, d’autres vont avoir envie de se cacher sous leur couette, d’autres encore continuent à travailler... Je pense que, quelle que soit la situation à laquelle on est confronté, il faut toujours demander aux autres de nous aider plutôt que de cacher sa maladie pour les épargner. Dans les salles d’attente des endroits où j’allais faire mes rayons et mes séances de chimio, je croisais de nombreuses femmes. Beaucoup d’entre elles portaient des fichus, des chapeaux, se cachaient, n’osaient rien dire à leurs enfants… Je leur disais : "Non, ils t’aiment, tu les aimes. Ils doivent te donner de l’amour, mais aussi t’aider à porter cette maladie. Ce n’est pas à toi de tout traîner." Il faut non seulement déléguer, mais aussi parler, pour que notre entourage comprenne ce qu’on vit. C’est, pour les personnes qui nous aiment, complètement abstrait : elles ne savent pas comment on nous traite, on nous manipule, ce que veut dire ce parcours du combattant.

L’exposition est-elle un moyen de créer ce lien entre les femmes atteintes d’un cancer et leur entourage ?

M. B-K : Il y a beaucoup d’enfants d’une petite dizaine d’années qui ont amené leur maman visiter l’exposition. Je les ai entendu dire : "Je veux que tu m’expliques, je sais que cette dame a été malade comme toi. Si c’est ça que tu vis, maintenant, je comprends mieux…" J’ai aussi eu des grands de 18 ans qui m’ont remercié, parce que, d’un seul coup, ils pouvaient enfin échanger avec leur mère sur un sujet dont personne n’osait leur parler. Cette exposition est un moyen de dédramatiser la maladie, de provoquer des discussions et des échanges avec le "patient". Et surtout qu’on arrête de le condamner et de le plaindre. Nous n’avons pas besoin qu’on nous plaigne, nous avons besoin d’amour.

Selon vous, le partage est donc la première clé pour vaincre la maladie ?

M. B-K : A mes yeux, oui. Mais j’ai toujours tout partagé avec mes amis, donc cela a coulé de source pour moi. J’aurais peut-être eu une réaction complètement différente si j’avais eu des enfants. Chacun à son parcours de vie, ses réactions… Je les respecte.


Vidéo : La maladie et le regard de Marine Bureau-Kohn

Marine Bureau-Kohn, artiste, explique comment elle a accepté la maladie, pour mieux la combattre par l'art.
Plasticienne, Marine Bureau-Kohn a dédié sa vie à l’art. A l’annonce de son cancer du sein, cet art s’est donc naturellement imposé comme un moyen d’exprimer ses angoisses. L’artiste revient sur ses premières confrontations entre elle et le « crabe », point de départ de l’exposition qu’elle a intitulé Nib’Art.

 

Vidéo : l'évolution de l'art au fil du traitement

Le cancer est une maladie aussi douloureuse que contraignante. Marine Bureau-Kohn a surmonté le quotidien grâce à l'art et son entourage.
Radiographies, chimiothérapie, interventions chirurgicales. Les créations de Marine Bureau-Kohn ont accompagné toutes les étapes de sa maladie : des oeuvres exutoires, mais surtout créatrices de lien, produites pendant ce moment de vie où l¹entourage compte plus que tout.


Vidéo : l'art thérapie, un apprentissage de soi

Son cancer vaincu, Marine Bureau-Kohn a mis un terme à sa démarche artistique autour de la maladie. Mais à travers ses œuvres, l’artiste continue d’exprimer son message : face au cancer, seuls le partage et la communication permettent d’aller de l’avant.

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A lire :
- Une année singulière avec mon cancer du sein, Maryse Vaillant, Albin Michel, 2008
- J’ai un cancer du sein… et après , Pascal Bonnie et Florian Launette, Romain Pages, 2007
- Manuel d’art-thérapie, Annie Boyer-Labrouche, Dunod, 2007
- L’Art-thérapie au quotidien : magie, couleurs, évasion et profondeur, Sylvie Batile, Les Pratiques Jouvence, 2007

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